Billets

Depuis janvier 2018, vous retrouvez chaque semaine, à la fin de votre lettre InfoFPJQ, sous la plume de journalistes et chroniqueurs bien connus, un point de vue ou une analyse sur l’actualité médiatique.

Les propos reproduits ici n’engagent que l’auteur. La FPJQ ne cautionne ni ne condamne ce qui est écrit dans ces textes d’opinion.

Comme peau de chagrin

Par Mathieu Roy-Comeau 

La crise qui secoue les médias et plus particulièrement la presse écrite n’épargne absolument personne. La multiplicité des sources d’information et la disparition des revenus publicitaires font des ravages dans les grands marchés comme dans les plus petits, en français comme en anglais, au Québec comme dans le reste du Canada. La taille des salles de nouvelles se rétrécit comme peau de chagrin et les journalistes se retrouvent au chômage. 

Même si absolument personne n’est à l’abri de cette tempête, j’estime humblement que c’est dans les communautés francophones à l’extérieur du Québec que la situation est la plus dramatique.

Alors que l’on assiste à une réduction de la pluralité des voix journalistiques dans les plus grands marchés, une réalité tout à fait déplorable, c’est une véritable extinction de voix qui guette la plupart des communautés francophones en milieu minoritaire. 

 On peut le dire plus crûment : même si les Montréalais perdaient deux quotidiens de langue française, une catastrophe en soi, ils pourraient tout de même continuer de recevoir un journal en français chaque matin au pas de leur porte ou dans leur tablette électronique. Les Franco-Ontariens n’ont, quant à eux, déjà qu’un seul journal quotidien. 
 
Évidemment, toutes les villes québécoises n’ont pas la chance de Montréal. L’information locale et régionale crie famine au Québec aussi. Toutefois, ailleurs dans la francophonie canadienne, l’information provinciale et nationale ne se porte pas beaucoup mieux que l’information locale. La tribune de la presse au Nouveau-Brunswick ne compte que deux journalistes francophones à temps plein (dont je suis) travaillant pour deux médias différents. Dans les autres provinces, la présence francophone à la législature se limite la plupart du temps au diffuseur public. 
 
À l’échelle nationale, certains francophones minoritaires se sont tournés vers les médias anglophones depuis déjà bien longtemps pour entendre parler d’Ottawa directement, sans que tout passe par le prisme québécois. 
 
Les communautés francophones hors Québec n’ont pas non plus le luxe de profiter de la présence de joueurs privés solides en information, à la radio et la télévision, en français. Au-delà de la presse écrite, l’offre médiatique se limite en général à la radio communautaire. 
 
La situation est d’autant plus préoccupante que les médias francophones en milieu minoritaire ne font pas qu’informer la population ; ils sont également d’importants outils de lutte contre l’assimilation qui participent à la survie de la langue française et de la culture francophone. S’ils disparaissaient, c’est uniquement en anglais que les francophones de ces régions s’informeraient sur ce qui les entoure (une tendance d’ailleurs déjà bien entamée dans certains milieux). 
 
Au cours des dernières semaines, le gouvernement fédéral a annoncé différentes initiatives pour venir en aide aux médias. Même si celles-ci sont loin d’être une panacée, elles permettront sans doute à plusieurs médias de garder la tête hors de l’eau. 

 

L’aide d’Ottawa est d’autant plus la bienvenue chez les médias francophones en milieu minoritaire que leurs provinces respectives n’ont pas été aussi généreuses envers eux que le gouvernement du Québec l’a été récemment pour les médias de cette province. 
 
L’idée derrière ce billet n’est pas de jouer à trouver le plus malchanceux. La crise des médias s’étend d’un océan à l’autre et fait mal à tout le monde. Chaque fois qu’un organe de presse met un journaliste à pied, à Montréal comme à Winnipeg, la démocratie en souffre. La crise est cependant l’occasion pour les journalistes de faire preuve d’une compréhension et d’une solidarité renouvelées. Nous sommes tous dans le même bateau. Nous menons tous le même combat. 

Mathieu Roy-Comeau est le correspondant de l’Acadie Nouvelle à l’Assemblée législative du Nouveau-Brunswick depuis 2014. Il est aussi le président de l’Association acadienne des journalistes.   

Les propos reproduits ici n’engagent que leur auteur. La FPJQ ne cautionne ni ne condamne ce qui est écrit dans ces textes d’opinion.  

 
 

 

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